L'accueil des personnes transgenres par les fédérations sportives (1/2)

L'accueil des personnes transgenres par les fédérations sportives   première partie d'un article coécrit par Salomé Cadon et Alice Billia

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5 min ⋅ 13/04/2023

Le débat sur la place des personnes transgenres dans le sport ne date pas d’hier, bien que certains évènements et polémiques l’aient remis sur le devant de la scène ces derniers temps. En 2022, la nageuse transgenre Lia Thomas est devenue la championne universitaire américaine du 500 yards nage libre. Cependant, plutôt que de féliciter la jeune femme, les débats se sont portés sur l’égalité des chances dans le sport. En effet, quatre ans plus tôt, Lia concourrait encore dans la catégorie homme. Beaucoup comparent alors ses résultats dans les deux catégories, et considèrent sa performance et sa victoires illégitimes, à cause de sa transidentité. Elle n’est pas la seule à avoir reçu une pluie de critiques après une victoire en tant que femme transgenre, Alana McLaughlin, combattante de MMA, s’est heurtée à la même situation lors de sa victoire en septembre 2021 contre Céline Provost, une femme cisgenre.

Ces cas ne sont pas isolés, loin de là, mais souvent la transphobie dans le monde du sport va bien plus loin que la seule critique d’inconnus sur les réseaux. En effet, certaines fédérations incluent dans leur règlement, des règles discriminantes et freinant l’accès au sport de haut niveau aux personnes transgenres. Prenons l’exemple de la Fédération Internationale de Natation (FINA), qui a décidé de créer une catégorie spécifique pour les athlètes femmes transgenres, avec l’argument que « Chacun d'entre nous doit toujours, dans les limites des principes d'équité, garantir l'inclusion de tous les individus quelle que soit leur orientation de genre ». Pourtant, cette décision ne revient qu’à exclure les personnes transgenres des compétitions traditionnelles, en plus de mettre encore une fois les femmes à l’écart, puisque la compétition masculine reste ouverte à tous.

Cependant, certaines fédérations ne dissimulent même pas leur décision d’exclure les athlètes transgenres féminines, comme c’est le cas pour la Fédération Internationale d’Athlétisme, qui a pris un virage politique majeur le 23 mars dernier. Elle a décidé d’exclure les femmes transgenres des compétitions féminines internationales, les désignant comme « les athlètes transgenres hommes et femmes ayant connu une puberté masculine ». Cette décision transphobe mais aussi misogyne, ne concernant que les compétitions féminines, voudrait s’expliquer par une envie de « protéger les compétitions féminines » et « d’assurer l’égalité des chances entre les athlètes ». Pourtant, il suffit de s’intéresser un peu aux règlements et aux contrôles auxquels se plient les athlètes transgenres à chaque compétition pour comprendre que ces arguments ne servent qu’à dissimuler la transphobie des fédérations et à la faire accepter par l’opinion publique.

Certaines fédérations ont pris le chemin de l’inclusion, comme la Fédération Française de Rugby et la Fédération Française de Hand. Ces dernières acceptent les personnes transgenres dans les compétitions nationales, mais selon certains critères. Comme la plupart des institutions sportives dans ce cas, elles se basent sur le taux de testostérone dans le sang pour assurer l’équité entre les joueuses cisgenres et transgenres. En effet, la testostérone d’avoir des os plus gros et plus denses, une masse de muscles plus importante, plus de globules rouges ou encore une taille supérieure à celle d’une femme cisgenre, autant d’éléments qui peuvent fournir un net avantage dans certains sports.

Lors d’un traitement hormonal, la testostérone produite naturellement par les femmes transgenres est bloquée et son taux descend petit à petit au cours du traitement, arrivant à un niveau égal, voir même inférieur à celui d’une femme cisgenre. Les avantages apportés par l’hormone disparaissent alors en grande partie, la masse musculaire diminue, tout comme la force. Néanmoins, cette réglementation reste problématique et contestée par de nombreuses athlètes transgenres. Tout d’abord, toutes les personnes transgenres ne sont pas sous traitement hormonal ou sous bloqueurs de testostérone, environ 20% des personnes transgenres ne le sont pas et ces dernières ont l’interdiction de participer aux compétitions. De plus, le critère de la testostérone reste incertain et discriminatoire, notamment pour les personnes hyperandrogines avec un fort taux de testostérone. Pour finir, même les femmes cisgenres ont un taux qui varie énormément, selon le lieu de vie, l’alimentation, l’état de santé, l’âge, le niveau d’activité physique, l’heure dans la journée ou encore le cycle menstruel. Même entre les genres, les taux peuvent suffisamment varier pour que les données d’un homme cis et d’une femme cis se chevauchent.

Il reste un long chemin à faire avant d’accéder à un sport bien plus inclusif, que ce soit pour les personnes transgenres mais aussi pour les personnes LGBTQIA+ en général et même pour les femmes en général, dans un milieu encore très misogyne. Mais le combat continue, porté et soutenu par de nombreuses associations comme la WPATH (World Professional Association for Transgender Health), la commission fédérale CADET (Commission Anti-Discrimination et Egalité de Traitement), l’association Au-delà du genre ou encore les associations OUTrans et Acceptess-T.  

écrit par Salomé Cadon

Sources :

https://www.francetvinfo.fr/sports/handball/l-inclusion-des-personnes-transgenres-dans-le-sport-en-france-malgre-des-discriminations-toujours-presentes-les-choses-evoluent-dans-le-bon-sens_4661441.html

https://www.lemonde.fr/idees/article/2022/10/25/inclusivite-ou-equite-le-sport-face-au-dilemme-des-athletes-transgenres_6147236_3232.html

https://www.liberation.fr/sports/athletisme-les-personnes-transgenres-qui-ont-connu-une-puberte-masculine-seront-bannies-des-competitions-feminines-20230323_KSOAKJ5BXVBTBBXF6JVHFWTLAM/

https://www.vojomag.com/news/luci-revoit-sa-reglementation-pour-les-athletes-transgenres/

https://www.francetvinfo.fr/sports/rugby/rugby-les-transgenres-autorises-dans-les-competitions-par-la-ffr_4626977.html

https://www.slate.fr/story/232511/femmes-trans-ont-elles-avantage-competitions-sportives

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