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Par N.O.U.S
26 mai · 4 mn à lire
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Journée mondiale sur les droits des femmes : les femmes en situation de handicap

A l'occasion de la journée mondiale sur les droits des femmes, N.O.U.S vous propose un article axé sur les femmes handicapées et les discriminations qu'elles peuvent subir dans leur quotidien, ainsi que les réponses apportées pour y remédier.

Selon l’Organisation Mondiale de la Santé, 1 femme sur 5 vit avec un handicap. Les femmes sont 2 à 5 fois plus exposées aux risques de violences que les autres femmes.

Dans Le Journal de Montréal, un collectif de signataires s’exprime : “nous ne nous contentons plus de gronder. Maintenant, il faut agir. Agir pour dénoncer les iniquités, les violences et les crises qui n’épargnent aucune d’entre nous, surtout pas les plus vulnérables”.

Les personnes handicapés constituent une minorité dans le monde, et les femmes en sont un groupe particulièrement vulnérable : elles sont souvent marginalisées et discriminées, à la fois vis-à-vis des femmes et des hommes non-handicapé(e)s et des hommes handicapés, ceci en raison de leur genre et de leur handicap.

Dans le cadre d’une enquête réalisée en 2022 par l’Ifop pour Ladapt (Association pour l’insertion sociale et professionnelle des femmes handicapées), être une femme en situation de handicap est qualifié d’une “double peine”.

L’ONU parle d’une dégradation du statut économique et social, de risques de violences et de mauvais traitements, de pratiques discriminatoires ainsi qu’un accès limité à l’éducation, à la santé, à l’information, à la justice et à la participation civique et politique.

“Etre une femme en situation de handicap est une double peine”

APAJH Guyane - Association pour adultes et jeunes handicapésAPAJH Guyane - Association pour adultes et jeunes handicapés

Les violences et discriminations qui les touchent sont spécifiques : cela passe par le retrait des aides dont elles ont besoin pour vire (autonomie, déplacements, communication), le refus des soignants de leur apporter de l’aide, la maltraitance des animaux aidants, le harcèlement, les insultes et les moqueries fondées sur le handicap…etc.

Elles subissent également des inégalités dans des sphères diverses de la société : professionnelle, familiale, conjugale…etc.

Les femmes handicapées sont particulièrement vulnérables aux violences sexistes et sexuelles (VSS). Selon l’étude mentionnée plus haut, 16% des femmes handicapées ont déjà été victimes de viols, soit une proportion presque 2 fois supérieure à celle observée pour l’ensemble des femmes. Les femmes ayant un handicap mental psychique ou cognitif présentent un risque accru d’être victimes de VSS : 33% des sondées témoignent avoir déjà été violées, un quart affirment avoir vécu des violences conjugales.

Selon la présidente de l’AFFA (Association des femmes autistes) Marie Rabatel, “l’agresseur est mû par une volonté de domination et profite de leur vulnérabilité accrue par le handicap”, “en fauteuil roulant, vous aurez du mal à courir. Sourde, vous n’entendez pas la personne arriver”. La vulnérabilité des victimes pousse leur agresseur à passer à l’acte. L’AFFA fait un constat alarmant : 88% des femmes autistes auraient été victimes de VSS.

“En fauteuil roulant, vous aurez du mal à courir. Sourde, vous n’entendez pas la personne arriver”

L’accueil des victimes par les forces de l’ordre est depuis longtemps le point noir de la lutte contre les violences faites aux femmes : c’est une épreuve encore plus compliquée pour les femmes handicapées.

Les policiers et les gendarmes ne sont souvent pas formés aux spécificités du handicap ni dotés des outils de communication nécessaires : l’audition des femmes handicapées est plus complexe, les femmes sourdes par exemple ont besoin d’un interprète.

Anna-Sarah Kertudo, fondatrice de Droit Pluriel (association de soutien juridique aux personnes handicapées), explique qu’”on a même demandé à certaines de mimer leur viol”. De plus, les symptômes post violences sont souvent mis sur le compte du handicap, ce qui fait que les femmes handicapées ne seront pas prises au sérieux par la police et les forces de l’ordre.

Campagne de la FDFA (Femmes pour le dire, femmes pour agir) pour le numéro d'urgence Ecoute ViolencesCampagne de la FDFA (Femmes pour le dire, femmes pour agir) pour le numéro d'urgence Ecoute Violences

Les femmes en situation de handicap subissent des discriminations et des stéréotypes qui sont des obstacles dans leur vie quotidienne, voire des violations de leurs droits humains. Elles ne vivent pas sur un pied d’égalité avec le reste de la société.

Les considérations et législations vis-à-vis des droits des femmes et de l’égalité hommes/femmes prennent rarement en compte le handicap.

En avril 2023, le Conseil de l’Europe rendait une décision estimant que les droits des personnes handicapées sont négligés en France. Ce constat s’ajoute aux condamnations répétées de l’ONU à ce sujet.

Le 8 mars 2023, l’ancienne Première Ministre Elisabeth Borne a présenté un plan quinquennal pour l’égalité entre les femmes et les hommes. Y figurait la création d’outils de signalement adaptés aux personnes handicapées à leur entrée dans une institution médico-sociale, un accès facilité aux soins gynécologiques, des ateliers de sensibilisation au consentement…etc.

L’ancienne ministre déléguée chargée des personnes handicapées Geneviève Darrieussecq souhaitait quant à elle la mise en place d’une formation des policiers et des gendarmes, ainsi qu’au sein de l’Education Nationale et du secteur médico-social, dans le but de détecter les signaux faibles et de recueillir les témoignages, notamment chez les personnes non verbales.

En avril de l’année dernière, le président Emmanuel Macron a promis la prise en charge intégrale des fauteuils manuels et électriques lors du discours de clôture de la Conférence nationale du handicap. Une promesse reprise en février dernier par l’actuel Premier Ministre Gabriel Attal.

Emmanuel Macron avait aussi annoncé une intensification de la formation des enseignants, et ce avec l’appui de professionnels médico-sociaux et de santé.

En France et partout dans le monde, des organisations sur les droits des femmes et des personnes handicapées tentent de faire parvenir les femmes en situation de handicap à une pleine inclusion sociale et en toute égalité avec le reste de la société. C’est le cas de France Handicap et de la FDFA, par exemple.

Au niveau mondial, ONU Femmes promeut l’inclusion des personnes handicapées et l’égalité des sexes. En 2017, l’organisation mettait en place une équipe de travail mondial sur le handicap et l’inclusion, soutenant le programme “the empowerment of women and girls with disabilities: towards full and effective participation and gender equality”, en partenariat avec d’autres agences onusiennes.

Dans la Convention des Nations Unies relative aux droits des personnes handicapées (CDPH), l’article 6 est relatif aux femmes en situation de handicap. Il énonce l’obligation pour les Etats signataires de reconnaître les discriminations que subissent les femmes et les filles handicapées et de prendre des mesures pour les contrer en garantissant leur épanouissement et leur autonomisation.

Notre monde vit depuis plusieurs décennies une transition numérique. Au niveau de la sphère professionnel, cela peut être une solution pour les personnes handicapées. L’adaptation d’un poste par des outils numériques permettrait de contourner le handicap et de permettre à des personnes qui ont des difficultés à se déplacer d’exercer une activité professionnelle.

L’Adefiph (association nationale de gestion du fonds pour l’insertion professionnelle des personnes handicapées) a publié une étude en novembre 2023 intitulée : “la transition numérique : un accélérateur pour l’emploi des personnes en situation de handicap”. Parmi les sondés, 65% affirment percevoir l’essor numérique comme une opportunité.

Cependant, si le numérique peut être une solution, il peut aussi être une barrière : il faut faire attention à ne pas isoler les personnes en situation de handicap, l’objectif est d’inclure mais pas dans des circuits séparés.

Aujourd’hui, l’utilisation du numérique est encore minoritaire chez les personnes handicapées : en effet, les sites internet ne respectent pas souvent les obligations légales en matière d’accessibilité et les personnes handicapées ne sont pas formées aux outils numériques.

Article écrit par Alice Billia.

Lien vers la tribune du Journal de Montréal : https://www.journaldemontreal.com/2024/03/08/le-8-mars-les-femmes-en-situation-de-handicap-grondent

Sources :

https://www.unwomen.org/fr/what-we-do/women-and-girls-with-disabilities#:~:text=On%20estime%20qu'une%20femme,d'entra%C3%AEner%20des%20limitations%20fonctionnelles.

https://www.unwomen.org/en/digital-library/publications/2018/12/the-empowerment-of-women-and-girls-with-disabilities

https://www.coe.int/fr/web/commissioner/-/addressing-the-invisibility-of-women-and-girls-with-disabilities

https://informations.handicap.fr/a-femme-handicapee-double-peine-enquete-alarmante-33893.php

Le numérique, une opportunité à concrétiser pour l’emploi des personnes handicapées – Libération (liberation.fr)

Handicap : l’Etat va consacrer 1,5 milliard d’euros pour une meilleure accessibilité – Libération (liberation.fr)

https://www.senat.fr/rap/r19-014/r19-0141.html

Image d’en-tête : https://www.handicap-international.fr/fr/actualites/lea-bayekula---ambassadrice-hi-et-para-athlete-primee

Image 1 : https://www.apajhguyane.org/journee-internationale-des-droits-des-femmes-2021/

Image 2 : https://fdfa.fr/ecoute-violences/

Image 3 : https://www.unwomen.org/fr/what-we-do/women-and-girls-with-disabilities